Qu’est-ce que la méditation de pleine conscience?

Ce mois ci j’ai le plaisir de vous parler d’une technique que j’utilise comme support de toutes les thérapies que je mène avec mes patients: la pleine conscience, également appelée mindfulness.

Je ne suis pas un « expert » en ce domaine et je n’ai pas envie de vous faire un cours littéral sur cette technique. J’aimerais simplement vous expliquer la façon dont je l’utilise en TCC et  vous donner l’envie de l’approfondir.

LA PLEINE CONSCIENCE – LA  MEDITATION

La pratique de la pleine conscience est un outil que j’apprends à mes patients systématiquement. Ici le but ultime est de développer sa capacité à être attentif.

Pratiquer la méditation c’est être ici, là, maintenant présent à cet instant et conscient de ce qui se passe en soi pour mieux s’orienter.

Alors qu’est ce que la pleine conscience?

La pleine conscience est une ancienne pratique bouddhiste. Elle a peu à voir avec la philosophie bouddhiste, mais beaucoup plus avec l’éveil de notre conscience et notre désir de vivre en harmonie avec nous même.

C’est en quelque sorte une méditation « laïque », débarrassée de toute conception religieuse. Il s’agit ici de prendre conscience de qui nous sommes, de notre place dans le monde et du chemin que nous souhaitons emprunter. Cette pratique méditative vise donc à cultiver l’instant présent. « Le pur plaisir d’exister » prôné par Epicure en son temps. Vous avez certainement entendu parler de cette philosophie de l’instant, le « carpe diem » : profite de l’instant présent. La pleine conscience est, en quelque sorte, l’application pratique de cette philosophie.

Concrètement, cela consiste à méditer, rester là inactif mais pas passif et à entrainer sa capacité à percevoir le moment présent. Il devient alors plus facile de trouver son chemin au milieu de la tourmente lorsque l’on perçoit le problème plutôt que lorsqu’on l’évite.

Percevoir le problème c’est d’abord percevoir ses sensations corporelles, les apprivoiser. C’est aussi percevoir ses pensées et parfois leur toxicité et enfin percevoir l’environnement dans lequel nous sommes à l’instant présent. Une sensation, une pensée dans un contexte précis.

La façon dont j’utilise la pleine conscience est, comme vous l’aurez compris, de travailler sa capacité à percevoir.  Mes patients sont souvent en souffrance soit par trop d’anticipation (rumination) ou bien soit parce qu’ils restent accrochés à des souvenirs douloureux au risque de rater le fleuve vie qui s’écoule. Un peu comme lorsque l’on rate la sortie d’autoroute, perdu dans nos pensées, par manque d’attention.

Le seul moment pendant lequel nous sommes totalement en contrôle, le seul qui pave instant après instant le chemin de notre vie est celui dont vous êtes pleinement conscient.

Ce que n’est pas la pleine conscience

La pleine conscience n’est pas un outil pour agir, pas un outil pour aller mieux ou se détendre. Ici le maitre mot est le « non agir ». Accepter, pour avancer.

Pour illustrer mon propos, vous êtes en colère, vous utilisez donc une technique pour vous détendre, la plupart du temps vous remarquerez que la colère monte encore plus…. « il faut que je me détende ». Cela revient ici à se détendre sans prendre conscience de cette colère. La colère, ici, est le problème, alors qu’elle peut être celle qui nous avertit que quelque chose cloche.

En pleine conscience, la réelle interrogation est: quelle est cette colère. faire corps avec sa souffrance est la seule solution ici d’y trouver un sens, une solution.

Soit :
Qu’est ce que je ressens ici et maintenant, mes sensations, mes pensées, quelle situation se présente à moi?

Comme nous verrons plus tard dans cet article la méditation consiste à faire « corps » avec soi, corps avec le monde, corps avec le problème.

Imaginez que vous soyez dans des sables mouvants. Votre première réaction sera de fuir et de vous débattre. En faisant cela votre corps s’enfonce et le problème grandit. Si par contre vous vous allongez et augmentez votre surface de contact avec les sables (et donc le problème) votre corps flotte et vous vous en sortez.

Faire corps pour avancer

Quelle est la différence entre la relaxation ou la sophrologie et la méditation?

Comme j’ai pu le préciser auparavant, méditer consiste au « non agir »,  prendre conscience pour laisser la solution émerger, laisser le corps, l’esprit, trouver leur chemin. Entrainer sa capacité à percevoir, à accepter ses sensations pour mieux nous guider vers ce qui est important pour nous. Mieux utiliser sa souffrance pour avancer.

La sophrologie, elle, consiste plus en l’application de techniques pour agir, pour résoudre, pour s’épanouir, pour rester zen. Cette approche est souvent difficile à mettre en œuvre sur le long terme car elle implique une action, du temps, une volonté, une connaissance de soi préalable. Or la vie nous enseigne que nous ne pouvons pas toujours être zen, voire que cela est même contre productif à certains moments.

Se relaxer peut parfois consister à un évitement du problème et donc se priver d’une chance de résoudre le problème d’une manière plus durable. Un peu comme si vous écopiez l’eau de votre barque qui coule, inlassablement. Peut être pourriez vous vous arrêter trente secondes, prendre pleinement conscience du problème et  laisser la solution émerger: boucher le trou.

Les bienfaits des méditations

Depuis quelques années les pratiques méditatives sont très étudiées par le champ scientifique. La recherche de solutions alternatives aux médicaments et autres interventions invasives poussent la science à explorer des solutions, anciennes, mais terriblement efficaces. C’est la neurobiologie qui nous apporte les effets les plus surprenants. Outre les effets positifs de la relaxation et de la médiation sur le stress, les maladies cardiaques, c’est sur l’immunité (neuro-psycho-immunologie) que je trouve les conséquences les plus inattendues.

Il a été en effet prouvé que la méditation favorise la production de globules blancs « tueurs » impliqués dans la réponse immunitaire, notamment respiratoire… imaginez l’apport sur toutes les maladies en rapport avec l’immunité. On sait également que méditer favorise la sécrétion de sérotonine, hormone dont la faible production est présente dans la dépression ainsi que les troubles alimentaires.

Bref, sans faire tout un étalage fastidieux des effets de la mindfulness sachez qu’aux États Unis, Kabatt Zinn, écrivain et psychiatre ayant développé cette approche en médecine, a carrément ouvert une clinique où l’on prend en charge tous types de maladies et troubles à l’aide de cette pratique méditative (voir référence en bas de page).

A méditer donc… 😉

Alors quand applique t’on la mindfulness en TCC et en ATC?

Sans passer en revue tous les troubles (voir les articles précédents) j’en citerai ici trois.

L’anxiété

Au cours de mon ancienne pratique de kinésithérapeute j’ai pu observer que les personnes anxieuses avaient une mauvaise conscience de leur corps ainsi qu’une perception des 5 sens assez peu développée à l’instar de leur capacité à penser. Ainsi ce dysfonctionnement est essentiel dans les troubles anxieux. En effet, une personne anxieuse a le contrôle pour Graal et l’incertitude pour énergie. L’anticipation est un mécanisme totalement à l’œuvre dans cette problématique si bien qu’il n’y a plus d’instant présent, là où pourtant le contrôle est maximum. Les manifestations d’angoisse prennent alors la forme de problèmes alors que ces signes ne sont que des symptômes naturels.

N’étant pas ici, là maintenant, dans son corps, la personne n’est pas à l’endroit du meilleur contrôle et perd en efficacité. Elle s’enferme alors dans une vaine lutte encourageant l’anticipation.

La pratique de la méditation lui permettra de percevoir à l’aide de ses 5 sens cet instant présent et ainsi récupérer le contrôle afin d’avancer efficacement dans sa vie

La dépression

La pratique méditative, outre de permettre au taux de sérotonine de remonter (les même effets que les antidépresseurs! Mais sans les effets secondaires), va permettre à cette personne de retrouver ce pur plaisir d’exister. La dépression se caractérise par une perte du plaisir et un ralentissement général du système. Ainsi méditer un peu chaque jour va lui permettre de retrouver un peu de ce plaisir, ainsi que mieux appréhender qui elle est: son corps avant tout et pour tout.

Les troubles du comportement alimentaire

Pour continuer de faire court. Ici, la médiation va être utilisée pour retrouver une stabilité dans la vision des aliments. Dans les TCA, une mauvaise perception des aliments ainsi qu’une tendance à manger trop vite sont impliquées. Le fait de ralentir et de développer ses 5 sens va permettre à la personne en difficulté de retrouver le VRAI plaisir de manger.

La méditation en pratique

La méditation que je propose est une pratique réalisable par tout le monde, tout le temps et en un minimum de temps quitte à approfondir par la suite.
Ici le principe est de s’entrainer à percevoir.  Il y a deux versions, une longue et une courte.

La version longue.

Installez vous assis d’une manière confortable et écoutez cet extrait sonore où je vous guide. Après il sera nécessaire de le faire seul(e) même si cela est plus difficile car n’oubliez pas que pour s’entrainer il faut peu à peu entrainer ses propres capacités. Un peu comme lorsque l’on enlève peu à peu les roulettes d’un enfant qui apprend à faire du vélo.

La version courte

Elle consiste en un instant à se demander ce que l’on ressent ici là maintenant et décrire:

Comment je respire
Comment mon corps est tendu (ou non )
Ce que ma tête me raconte à cet instant
Dans quel environnent je suis.

Cela doit prendre en tout et pour tout 30 secondes.

En enfin quel bonheur de faire cela ne pleine nature. Se concentrer sur les bruits, la façon dont je pose mes pas (une idée de kabatt Zinn). Mais aussi au restaurant, explorez vos 5 sens! La pratique méditative n’est pas qu’une question de temps, de philosophie c’est avant tout une autre approche de l’efficacité dans ce monde qui nous en demande tant.

Quelques livre pour approfondir :
Kabatt Zinn Où tu vas tu es
Christope André: Méditer, jour après jour.