Psycho-Pratique

Mais comment se défaire du « mais », un mot qui annule tout

Bonjour à toutes et à tous,

Il faut que je fasse du sport… ça nous l’avons vu le mois dernier. Ce mois-ci ce serait plutôt il faut je prenne soin de moi oui mais… oui mais j’ai du travail en retard.. oui mais je n’ai pas le temps.

Tu as eu 15/20 en math c’est bien.. oui mais tu bavardes toujours en classe. J’ai passé un bon week-end oui mais je ne supporte pas mon collègue de travail. J’ai passé de bonnes vacances!! Oui mais il faut reprendre le train train quotidien.

Deux mots. Deux mots et tout le plaisir, la fierté d’une bonne note, la détente des vacances partent en fumée: OUI MAIS.

Oui mais est bel et bien le frère jumeau du il faut que. Ces quelques mots modifient, nous l’avons vu le mois dernier, tout le vécu de notre vie.

Si tu dis oui mais, j’annule tout

Cette petite conjonction marque ici à elle seule une opposition, une contradiction. Le oui mais annule alors ce qui précède pour bien souvent ne retenir que le moins bien

Le verre est à moitié plein oui

mais il est à moitié vide

Elle reflète alors notre intolérance à ce qui ne va pas. La non acceptation de ne qui ne devrait pas être: les problèmes, les ennuis, les contrariétés.

Dans notre culture du Bien et du Mal, forcément, le choix est fait. Nous choisissons le bien et tentons de rejeter le mal sans cesse. Et, tel Sisyphe qui pousse sa boule nous nous épuisons à lutter

Mais, cela tient aussi de notre côté idéaliste (Merci Platon et autres consorts) où la vie serait un idéal de bonheur, de pureté, débarrassée de toute impureté. L’Idéal, parfaite chimère du fond des âges, est alors quelque chose d’inatteignable et pour cause c’est un idéal! Le problème vient alors lorsque notre tête nous vend l’idée que l’idéal est bien la normalité: « Les ennuis, ce n’est pas normal ». Ainsi si nous n’y arrivons pas c’est bien de notre faute, s’en suit tout un lot de culpabilité.. tout cela avec deux mots: Oui Mais. Dans l’idéal tout aurait, tout devrait bien se passer.

Le positif à tout prix

Effectivement il en vient alors que le positif, le bien, soit le but suprême à atteindre quitte à en payer le prix.

Oui mais… combien cela nous coûte de poursuivre un idéal? Et si toute l’énergie que nous mettions à espérer que tout se déroule sans accro était mise dans la construction d’une maison. Quelle taille ferait la maison?



Dire oui à la vie sans prendre le non n’est-ce pas funeste et sans fin? Mais d’ailleurs est-ce véritablement ce que nous souhaitons? Pas si sûr.

En effet, en comparant systématiquement nos actions, notre vie, à l’étalon de l’idéal c’est un peu comme la comparer à l’infini. Que vaut un millions d’euro face à l’infini? Peu de chose. Et comparé à votre solde bancaire de ce matin? Il en est tout autre non?

Je vous ai parlé dans un précédent article du bonheur de posséder un havre de paix: un étang des Dombes. Paisible, calme, sans accro. Un heure? Magnifique, bucolique. Deux jours? Ressourçant, apaisant. Deux semaines? Déconnectant, zenifiant. Deux mois?

Refuser les accro de la vie, les contrariétés c’est l’appauvrir, la stériliser un peu comme dans les livres de science fiction tel  Le meilleur des mondes d’Aldous Huxley ou personne ne meurt où il n’y a plus de maladie. Que se passe-t-il lorsque plus rien ne se passe? La tyrannie du bonheur et son chef suprême le Bien.

Plus encore, lorsque plus rien ne se passe sans accro cela revient à atteindre ce que les bouddhistes appellent le Nirvana. Il est alors intéressant de définir ce vers quoi nous aurions tous tendance à agir. Le Nirvana est la disparition de toutes souffrances, toutes douleurs – ce que le philosophe antique Épicure appelle également l’Ataraxie (le bonheur comme absence de douleur). Mais, le nirvana implique alors l’absence de désir, de plaisir. Y êtes vous vraiment prêt.e?

Si j’avais une baguette magique feriez vous disparaitre ce caillou qui vous taquine la plante de pied? Les attentes du Oui mais revient ainsi à attendre cela…

 



…Stériliser la vie.

Ainsi tel que Nietzsche nous le raconte encore, l’amour de l’idéal est bien une haine du réel.

Mais alors, nos plus grands plaisirs ne sont-il pas issus de nos plus grandes difficultés? A vaincre sans péril on triomphe sans gloire disait Pierre Corneille dans le Cid. Imaginez vous tenir un drapeau Français au somment de l’Everest sans ayant éprouvé ne serait-ce qu’une seconde de difficulté, de peur. Quelle satisfaction en retiriez vous?

Les accros sont bel et bien le sel et le poivre de la vie.



Tout est relatif


Vivre en n’aimant qu’une partie n’est guerre possible. Aimer une partie c’est aimer le tout. C’est en partie ce que nous enseigne la Gestalt ou le tout est plus important que la somme des parties. Explications.

Voyez ce magnifique vase? Mais si là, juste en dessous, si beau avec ses courbures et sa coupe des plus élégantes. Non, vous n’en voyez rien? Bizarre pourtant il est bien là…

 

 

 

 

Non? Et si j’ajoute un peu d’obscurité n’y voyez vous pas un peu plus clair? Ce vase de Rubin aux courbes féminines et graciles est beau OUI MAIS….. il y a du NOIR!!

 

 

Oui, tout est bien relatif. On ne peux percevoir quelque chose sans son exact contraire. Dire oui à la vie c’est accepter le non, c’est accepter les accros, la souffrance, les angoisses. Vouloir prendre l’un sans l’autre c’est au final ne rien avoir.

Inutile alors d’y revenir et passons alors au Grand OUI Nietzschéen, Un OUI Total à la Vie avec tout ce qu’elle peut nous amener.

 Oui Mais, Oui ET?

Revenons à notre histoire

Tu as eu 15/20 en math c’est bien.. oui et tu bavardes toujours en classe. J’ai passé un bon week-end oui et je ne supporte pas mon collègue de travail. J’ai passé de bonne vacances!! oui et il faut reprendre le train train quotidien.

Quelle différence cela fait pour vous de passer au Grand OUI? Le OUI ET j’accepte les accros.

En même temps

Dire oui et c’est faire preuve d’acceptation. Faire preuve de cela c’est alors mettre en évidence ce qui va bien et le porter sur l’autel de la vie.

Ceci ne veut pas dire qu’il ne faille pas lutter conter les inégalités, la souffrance mais bel et bien leur faire une place pour peut être ensuite limiter leur place.

Dire Oui à la vie telle qu’elle c’est alors prendre ce qui vient et s’en servir ou rien n’est chance ou malchance comme développé dans cet article.

Passer à l’heure du ET peut alors nous permettre de réellement profiter des choses agréables sans les remettre en cause. Il y a certes les accros oui et il y a aussi le bonheur de ce week-end.

Pour finir cet exposé j’aimerais une fois de plus citer Nietzsche (ce doit être ma période)

Dans tout ce qu’on élude et tout ce que l’on nie on trahit un manque de fertilité ; au fond, si seulement nous étions de la bonne terre, nous devrions ne rien laisser perdre sans l’utiliser et voir dans toutes choses, tout événement, tout homme un engrais, une pluie, un rayon de soleil bienvenus (Humain, trop Humain, II, 1,332)

  

Un exercice?

Remplacez des que vous le remarquerez les OUI MAIS par des OUI ET et observez ce que cela fait comme sensation dans le corps.

A bientôt

Yannick


 

Psychologue aux multiples influences je base ma pratique de prise en soin sur la thérapie d'acceptation et d’engagement, la psychologie positive ainsi que les thérapies cognitivo-comportementales. En institution, en cabinet de ville, en formation professionnelle ou encore en tant que Blogueur ma vision de la personne en souffrance est bien celle d'une personne non pas "malade" mais plutôt "coincée": En devenir. C'est ainsi à travers une pratique mêlant psychologie, philosophie, humour et métaphores que je voue mon activité professionnelle à aider la personne à avancer vers ce qui compte pour elle.

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