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La santé mentale sans tabou #1 : L’anxiété, la peur, l’angoisse, comprendre-gérer- accepter

La peur, l’anxiété, l’angoisse. Changeons notre regard sur ces tourments et surtout, examinons comment soigner ces troubles si fréquents parmi nous?
 
 Il arrive à chacun d’avoir peur, nous avons tous déjà été anxieux. Nous savons donc tous de quoi on parle lorsqu’il est question de peur ou d’anxiété. Or, combien d’entre nous acceptent de s’exprimer sur ses peurs et autres noires angoisses ?

Peu, pas assez. Combien d’entre nous restent à souffrir par honte ou errent sans espoir d’en sortir un jour ? Trop, beaucoup trop.
 
Ceci est d’autant plus rageant que bon nombre de solutions existent, bon nombre de techniques, de psychologues ou autres psychiatres sont là pour aider à soigner cela et pas qu’avec des médicaments. Défrichons un peu ce chemin semé de préjugés et de, bien trop, d’épines.
 
Commençons par appeler un chat un chat. Là où la peur est une émotion en relation avec un danger réel, l’anxiété est, quant à elle, une manifestation psychologique face à quelque chose de plus diffus, de non palpable. L’angoisse, similaire à l’anxiété se situe plus du coté des ressentis corporels. Ceci est dit.

Peur et peur?

Tout est alors une affaire et d’intensité et d’adaptation au contexte. La peur des araignées est moins réaliste que la peur d’un homme qui nous menace de son poing. Autant que de sauter sur la table à la vue de cette araignée est moins adapté que de courir face à ce même homme. Tout devient aussi une affaire de degré lorsque l’on veut parler de souffrance car, dans ces peurs, il y a une intensité qui perturbe au point de constituer un réel handicap : un trouble anxieux.
 

Ces troubles anxieux sont les troubles psychiques les plus fréquents qui existent (18% de la population). Il sont souvent détectés et traités tardivement. Cela tient justement au fait que de nombreuses personnes ont peur ou honte de parler de leurs problèmes psychiques et d’aller voir un spécialiste. Tabou que cet article tente de faire tomber.
 
Leur origine tient à des facteurs multiples, en particulier à des facteurs génétiques, des facteurs environnementaux (liés à l’éducation) et des évènements liés à des événements traumatiques.
 
Heureusement, il existe des traitements efficaces et prouvés pour prendre en charge ces troubles si nombreux et invalidants: Notamment les TCC et l’ACT !!
 
Si vous ne savez pas ce que sont ces initiales cliquez sur les liens suivants:
 
 
Faisons plus particulièrement connaissance avec la peur.

Alors cette peur, protectrice ou bien néfaste?

 
Faisons appel à Darwin. Si la peur est une chose qui a été conservée c’est que, d’un point de vue de l’évolution, elle a un intérêt. Mais alors lequel? Imaginez deux hommes de Cro-Magnon, entre celui qui a peur tout le temps et celui qui ne s’inquiète de rien, lequel a survécu?
 
 
Ainsi la peur est un mécanisme qui nous a permis de devenir l’espèce dominante sur cette terre (pour le meilleur et pour le pire). Alors, comment celle-ci peut nous être parfois aussi néfaste? Explication.
 
Observez le schéma ci dessous en suivant les chiffres.
 
 
Imaginez qu’un bruit de marteau piqueur arrive à votre système nerveux central, le Big Brother cérébral, qui perçoit tout des cinq sens aux images en passant par les pensées et sensations intérieures.
 
Cette onde sonore va être traitée de deux manières, l’une, la raison « tiens des travaux », l’autre ,l’émotion, « pff, encore, c’est pénible…. ». Il existe une partie du cerveau, le système nerveux autonome, qui va transcrire cette émotion en réponse corporelle.
ça va  vous me suivez toujours?
Soit cette émotion est jugée non dangereuse et il active la réponse de détente: le mode caverne (la perpétuation de l’espèce). Soit celle ci est considérée comme dangereuse et est activée la réponse de défense: le mode savane (la survie). Comme vous l’aurez compris, ce mode est une réaction de défense face à une agression, telle une gazelle confrontée à un lion. A partir de là, trois réactions sont possibles, fuir, combattre ou faire le mort, d’où les 3F: Fight, Fly et Freeze. Que fait le corps ainsi? Il déclenche une réaction générale de tension soit, entre autres, l’augmentation :
  • Du rythme cardiaque
  • De la respiration
  • De la vigilance
  • Des tensions musculaires
  • De la pression artérielle
Tout ceci décrit la réaction à une stimulation jugée comme agressive et bien sûr la réaction est proportionnée à la menace. Autre conséquence, il y a une inhibition du mode caverne d’où une perturbation de la digestion, du sommeil ou bien de la sexualité.
 

Et c’est normal

Oui, cette réaction est tout à fait normale, car que serait un monde sans peur, sans angoisse propre à anticiper un danger diffus mais peut-être présent ? Non la peur n’est pas un problème, il faut le dire et bien fort. Pas plus que l’anxiété et l’angoisse. Pas de honte à avoir, point de faiblesse des corps ici. Encore moins de mauvaises sensibilités au sein de salvateur processus de survie. Tout le monde a peur et tant mieux car je suis bien heureux depuis que mon fils a peur de tomber à vélo et que ma fille a peur de tomber sur un petit blaireau, à une de ses soirées. La peur n’évite pas le danger mais elle nous permet de réagir au mieux.
 

Alors quand est-ce que cela coince?

 
Disons, quand la raison s’en mêle: l’appréhension, la préhension (la façon dont on manie la peur). Craindre la peur et  l’angoisse, c’est s’attendre à ce qu’elles ne se pointent point, ce qui nous pousse parfois à penser : « pourvu que cela ne se représente pas » ou « ça recommence » à la moindre perception d’un petit signe de tension. La peur de la peur. Ces pensées agissent comme des déstabilisations et réactivent le système de défense. La boucle est bouclée, un cercle vicieux se créé, un trouble se développe. Ce magnifique mécanisme de survie se prend les pieds dans le tapis lorsque la peur d’avoir peur prend le pas sur le danger en lui même. La peur et son cortège de sensations physiques deviennent alors des dangers à fuir à tout prix. Nous passons dès lors plus de temps à lutter pour ne pas avoir peur (éviter, ruminer, fumer, manger, procrastiner) plutôt que de passer à agir envers ce qui compte pour nous. Le problème est donc surtout lorsque nous n’avançons plus.
Ainsi entre la peur qui gène et la peur qui handicape il n’y a qu’une différence de degré… degré qui évolue donc en fonction de ce que l’on fait face à la peur.
 

Petite peur peut devenir grande

 
Voici quelques exemples de peurs qui font sourire et leur égal qui traumatise
  • « Soucis »
    •  Sans souffrance et/ou handicap   « Soucieux »
    • Avec souffrance et/ou handicap : Anxiété généralisée. L’intolérance à l’incertitude, c’est aussi ce que j’appelle le « forfait soucis ». Notre tête nous raconte en permanence des soucis sur tout et tout le temps.

  

  • « Peur des araignées et autres »
    •  Sans souffrance et/ou handicap   « Peur »
    • Avec souffrance et/ou handicap : « Phobie spécifique »… le problème est alors lorsque ces évitements nous empêchent de vivre. Comme par exemple une phobie du sang nous empêchant de nous soigner.

 

  •   « Peur des foules/ peur des autres »
    •  Sans souffrance et/ou handicap   « Peur simple »
    • Avec souffrance et/ou handicap : Agoraphobie/ Phobie sociale. Là encore, le problème est lorsque l’on cherche à éviter à tout prix le regard des autres, lorsque l’on a tellement peur de rater qu’on ne tente pas.

 

  • « Manie de l’ordre »
    •  Sans souffrance et/ou handicap   « Maniaque »
    • Avec souffrance et/ou handicap : Trouble obsessionnel compulsif. Lorsque l’on passe plus de temps à ranger sa chambre qu’à profiter de ses amis.

Il y en a encore beaucoup d’autres soit: Les attaques de panique (spasmophilie ou crise d’angoisse), l’hypocondrie (traitée dans cet article), le stress post traumatique ou encore l’anxiété de séparation.

 

Alors comment faire?

 
D’une manière générale, en TCC, nous abordons les troubles anxieux en commençant par les comprendre. C’est ce que l’on nomme l’analyse fonctionnelle. Connais toi toi même écrivait Socrate. Ici ce serait « connais ta peur toi même » (mais pas tout seul). Nous faisons ainsi un travail d’auto observation sur les situations déclenchantes, les pensées associées, les émotions et sensations et enfin le comportement qui en découle

 
Par exemple en cas de claustrophobie. 
 
Elément déclencheur : rester bloqué dans un  ascenseur Pensée: « je vais y rester » « je vais étouffer » Emotions sensations : oppression, peur. Conséquence: éviter tout les endroits où la personne peut rester bloquée  

Par la suite chacun de ces éléments sont pris en compte. En voici quelques uns :

  
Ca va passer: L’habituation


 
Ainsi le traitement, chez cette personne, sera de l’exposer progressivement à ces situations anxiogènes après avoir appris les techniques de gestion respiratoire et des pensées afin de provoquer ce qu’on appelle le processus d’habituation.

Imaginez une souris, vous lui présentez un chat. Au début, forcément le mode savane se déclenche. Puis, à force de rester en contact avec ce chat qui ne la mange pas, cette souris va s’habituer à lui. C’est à dire qu’elle va faire l’expérience de l’habituation, l’angoisse finit toujours par retomber. Ce qu’elle n’aurait pas pu expérimenter si elle avait fui donc évité.

 
Ici l’évitement aurait aussi consisté à faire autre chose pour que l’angoisse tombe. Soit fumer, manger ou bien prendre un médicament. Ce qui, par conditionnement, conduit à faire ceci à chaque fois que nous sommes en état de peur ou d’anxiété… un autre problème commence (voir l’article sur les troubles du comportement alimentaire)
Ainsi en TCC nous apprenons cette habituation mais d’une manière progressive suivant les capacités de la personne.
 

Ca va passer: L’acceptation

En thérapie d’acceptation et d’engagement nous insisterions plus sur le caractère inévitable de l’anxiété. Puisqu’elle est là, autant composer avec. Mais aussi sur son caractère protecteur. Apprendre à augmenter son degré de tolérance à la peur, apprendre à faire les choses malgré l’angoisse, s’appelle ici l’acceptation. J’en parle plus ici comprendre l’acceptation mais disons que c’est un peu comme en course à pied, on fait avec la douleur. En ayant moins peur de la peur, celle-ci prend alors moins de place et surtout nous redevenons maitres de nos actions. Je ne vais pas plus loin car tout est écrit dans l’article cité précédemment. Un exemple vaut en revanche ainsi mille mots :
 
Explication:
« J’ai peur d’échouer à cet examen » ou « il ne faut pas que j’échoue »
Soit j’écoute cette peur d’une manière nocive, et donc à combattre, et je m’enferme dans des solutions alternatives qui m’éloignent de la personne que je voudrais être (évitement des examens, médicaments) ou bien j’accepte cette peur et essaye de la comprendre. Que peut-elle bien vouloir me dire?
Si cette pensée vous voulait du bien mais qu’elle s’y était mal prise?. Oui, en effet, une maladresse. Que diriez vous de cette autre interprétation?
« c’est important pour toi de réussir alors donne tout ce que tu as pour y arriver » ou bien « si tu ne veux pas échouer travaille ». Prenez ainsi celle-ci comme une invitation à l’action. Et si vous suivez ma pensée tortueuse… n’est-ce pas un des premier rôles du mécanisme de peur… AGIR pour survivre. Bon d’accord, je ne vais pas mourir si j’échoue mais le canal est similaire. Capito?
 
Cet exemple est bien sur réducteur, car les choses sont bien sur plus complexes, mais c’est pour vous donner une idée.
 
 
Aimer et comprendre sa peur
 
Ainsi après s’être débarrassés des réactions physiques intenses, peut être pourrions aimer nos peurs pour ce qu’elles nous invitent à faire. Peut être que s’il n’y avait pas la peur, de nombreuses expériences de notre vie n’auraient plus la même saveur. Imaginez votre premier flirt sans la peur de mal embrasser!. Imaginez un concert ou  bien une pièce de théâtre avec la certitude de réussir…. il arrive même que l’on paye pour avoir peur!
 
Alors? On jette le bébé avec l’eau du bain? Bien sûr que non, à nous, en thérapie, d’équilibrer les choses. A nous de faire en sorte que cela ne nous empêche plus d’avancer.
 

A bientôt,

Yannick
 

Psychologue aux multiples influences je base ma pratique de prise en soin sur la thérapie d'acceptation et d’engagement, la psychologie positive ainsi que les thérapies cognitivo-comportementales. En institution, en cabinet de ville, en formation professionnelle ou encore en tant que Blogueur ma vision de la personne en souffrance est bien celle d'une personne non pas "malade" mais plutôt "coincée": En devenir. C'est ainsi à travers une pratique mêlant psychologie, philosophie, humour et métaphores que je voue mon activité professionnelle à aider la personne à avancer vers ce qui compte pour elle.

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