Psycho-Pratique

Affirmatif chef ! L’affirmation de soi

 
Ce mois-ci, l’affirmation de soi. Affirmez-vous ! Comme dirait Frédéric Fanget dans son livre sur le sujet. Pas si facile. Effectivement, en manière de communication, nous n’avons pas tous les mêmes cartes en main. C’est pourquoi beaucoup de souffrances viennent d’une affirmation de soi défaillante.
 

Alors qu’est-ce que l’affirmation de soi?

 
Savoir s’affirmer c’est savoir, sans émotion trop importante, demander ou refuser, savoir engager la conversation, verbaliser ses idées et ses sentiments lorsque c’est nécessaire, tout en gardant une bonne relation avec son interlocuteur.
 
Le manque d’affirmation se manifeste souvent par deux comportements et deux pôles d’actions, soit:
 

Le comportement passif

 
Je dis toujours oui car je ne sais pas ou n’ose pas dire non. Au final j’ai de bonnes relations avec mon entourage, les gens m’aiment bien (c’est un de mes objectifs premiers) sauf que leurs besoins passent toujours avant les miens. Ne sachant dire non je me fatigue, m’use parfois jusqu’à la dépression. En tout état de cause mes besoins n’en sont que rarement assouvis. Dans les relations sociales je pars souvent avec une opinion et reviens avec celle de l’autre. En un sentiment: Frustration.
 
 
 

Le comportement agressif

 
 
Mon opinion est toujours la bonne, d’ailleurs c’est la seule qui compte aux dépends de celle des autres. Je m’énerve souvent et n’ai qu’une seule corde à mon arc communicatif : râler. Ainsi mes besoins sont toujours assouvis au détriment d’une bonne relation avec autrui. Mais au final ce comportement est assez coûteux en énergie et me fait souffrir. Cela me donne un sentiment de solitude. Ce type d’attitude peut être également problématique au travail où un manque de forme peut être un frein dans une carrière.
 
A ces deux comportements j’en ajouterais un troisième.
 
 

Le passif – agressif

 
Le syndrome de la cocotte minute : Je suis passif, je satisfais tout le monde au point de n’en plus pouvoir, et craquer à en être agressif. Souvent cette agressivité se déverse au mauvais moment, du moins… jamais au bon et souvent d’une mauvaise façon.
 
Par exemple:  Lucie, lors d’un repas entre amis,  se met à crier après  Sébastien. Il a une fois de plus oublié de lui apporter son livre. Cette colère n’est, à ce moment là, pas en rapport avec la situation. Elle concentre toutes les frustrations de ne pas savoir demandé d’une manière affirmée de lui rapporter son livre. Au final, Lucie s’excuse de ce comportement qu’elle-même réprouve, par peur de ne pas être aimée, et s’en repart avec honte, sans le livre.
 
Ces trois types de relations, sources de souffrance, ne sont pas une fatalité, tout s’apprend. Si c’est votre premier article sur ce blog je vous conseille de lire d’abord l’explication de ce que sont les TCC et l’ACT avant de continuer (les deux premiers articles parus).  Oui, ce n’est pas une fatalité car comme vous le savez, en TCC, nos problèmes s’entretiennent souvent par un manque de compétence dans une situation particulière ici: communiquer.
 

 

Alors comment fait-on?

 
Le but d’une TCC dans le cadre d’un manque d’affirmation de soi ou d’une anxiété sociale (anxiété liée aux situations d’interactions sociales, la timidité en plus conséquent si vous voulez) est d’arriver à un comportement Affirmé. Le comportement affirmé consiste à verbaliser ses désirs tout en prenant en compte ceux de l’autre et être capable de proposer un compromis ou bien de tenir ses choix. Par exemple:
« J’ai bien compris que cela ne te dérangeait pas de vivre dans une chambre non rangée mais cela me fait de la peine, serais-tu d’accord pour la ranger où si tu veux nous la rangerons ensemble pour commencer. » Retenez la formule magique de l’affirmation :
 
Serais-tu d’accord pour…
 
Vous verrez votre pourcentage de Oui grimper en flèche.
 
Alors pour s’affirmer il faut d’abord comprendre la communication. D’une manière succincte, retenez qu’il y a deux canaux de communication :  le verbal « ce que je dis » et le non verbal « ce qui se dit, malgré moi ». Il faut ainsi savoir travailler ces deux aspects.

 

Le verbal

 
Savoir placer sa voix, parler lentement, articuler…
Savoir être direct sans dériver, se justifier ou expliquer, ce qui brouille le message initial
Savoir demander, exprimer un compliment ou une critique et les recevoir

 

Le non verbal

 
Savoir présenter une mimique agréable
Savoir parler avec son corps
Savoir se placer à une distance
 
Mais avant tout il faut savoir Écouter. En effet, souvent les problèmes commencent par une mauvaise écoute, un quiproquo. Car souvent, on entend ce que l’on veut entendre…
 
Entre
Ce que je pense,
Ce que je veux dire,
Ce que je crois dire,
Ce que je dis,
Ce que vous avez envie d’entendre,
Ce que vous croyez entendre,
Ce que vous entendez,
Ce que vous avez envie de comprendre,
Ce que vous comprenez,
Il y a neuf possibilités qu’on ait des difficultés à communiquer.


Mais essayons quand même…
 
« Parler est un besoin. Écouter est un art. »
Goethe
 
 
Bien sûr votre tête est déjà en train de vous dire « je n’y arriverai jamais ». Regardez comment on apprend cela en thérapie TCC.
 

La Thérapie de l’affirmation

 

Premièrement : comprendre ce qui cloche

 
Pour cela nous utilisons le système des cercles vicieux. Dans  une situation de forte émotion liée à un manque d’affirmation de soi, entraînez-vous à percevoir
 
 
Ce qui a déclenché
   Pierre m’a demandé si je pouvais garder ses enfants demain soir
Ce que je me suis dit à ce moment 
« je ne peux pas mais si je dis non il va m’en vouloir »
Qu’elles ont été mes sensations et mes émotions
Frustration, Colère, sensation de boule dans le ventre
Qu’ai-je fais? Ais-je affronté ou évité la situation 
J’ai évité ce qui est important pour moi au profit de Pierre en disant OUI
Que me suis je dis après? 
 
  « Je suis nulle, c’est toujours comme ça,
on ne pense jamais à moi »
 
 A la lecture de ce tableau vous aurez compris que la séquence s’auto-entretien. En effet,  en évitant la situation (le choix de mes opinions) je perds peu à peu ce savoir-faire et crée une habitude chez l’autre. De plus,mes pensées négatives à posteriori minent ma confiance en moi.
 
Ce cercle peut devenir chronique au point de s’appeler anxiété ou phobie sociale. La phobie sociale est un évitement systématique de toute situation d’interaction ou de relation avec autrui. C’est un trouble réel et conséquent qui paralyse la personne au point de lui faire quitter son travail par exemple.
 
De l’évitement nait la phobie   
 
 
 

Deuxièmement : S’entraîner à gérer ses émotions et habiter son corps

 
En effet, pour s’affirmer, faut-il encore savoir qui l’on est, en premier lieu son corps. C’est pourquoi les techniques de pleine conscience (voir article précédent) sont toutes indiquées pour ce travail. L’objectif, ici, est d’apprendre à mieux percevoir ses émotions et sensations sans lutter contre ces dernières. Ce faisant, il devient plus facile de parler ayant géré l’émotion qui souvent nous fait bafouiller ou crier.
 
Etre « bien dans son corps » va naturellement rendre plus facile le langage non-verbal, la posture par exemple. Ce qui facilitera d’autant plus la communication au vu de l’importance du non-verbal.
 

Troisièmement: Écouter pour se faire entendre.

 
Ici le but est de s’entraîner à écouter ce que dit l’autre, ses mots, ses mimiques ceci afin de comprendre ce qu’il veut dire parfois avec détour plutôt que ce que l’on croit entendre. Un autre outil magique est « l’à priori du doute positif ». Souvent nous réagissons à l’autre en prenant l’hypothèse la plus négative « il a dit ça parce qu’il m’en veut…etc. » bien souvent on se rend compte que pas du tout! Et on en rit pour peu que la situation se dénoue comme ceci mais il arrive que notre interprétation aggrave tout. Prendre l’hypothèse positive (celle la plus fréquente) évite bien des problèmes.
 
Ensuite seulement on peut travailler la communication. Communiquer ses émotions et ses sentiments est souvent la meilleure des façons d’obtenir une réponse adéquate. Exemple :
 
« Cela me ferait plaisir d’aller au cinéma avec toi » plutôt que « et si on allait au cinéma »
 
« Je suis en colère car tu as oublié mes clés » plutôt que « tu as encore oublié mes clé, tu as intérêt à les ramener »
 
 
Une autre technique consiste à envisager la position de l’autre, notamment pour la démystifier. Les problèmes d’affirmation viennent souvent de la non considération de l’autre à sa juste position. Prégnante pour les passifs, absente pour les agressifs.
 
Me dire ainsi « que pense l’autre de ce que je lui dis » ou « comment aimerai-je que l’on me parle? »
 

Essayez…

 
 
Enfin, recevoir et émettre une critique ou un compliment font partie des écueils des non-affirmés. On rejette souvent les compliments autant que les critiques nous emportent.
 
Voir en quoi l’autre a raison et en quoi cette critique peut me faire avancer ou en quoi  elle est injuste et le verbaliser est important en société. Lorsque l’on reçoit une critique, que l’on soit passif ou agressif provoque d’importantes émotions qui emportent tout telle une vague, un tsunami: je suis cette critique. Or, cette critique vous résume t’elle au point d’avoir un pouvoir de vie de mort sur vous? Ce compliment est-il si faux que cela?
 
Tout s’apprend mais parfois avec du temps et l’aide d’un thérapeute c’est plus facile. Mais essayez ce type de phrase:
 
« Je suis d’accord avec toi sur ce point et je te remercie de m’en avoir fait part, en revanche je ne le suis pas sur celui-ci car… »
 
« Cela me fait très plaisir ce que tu me dis, je t’en remercie »
 
Observez bien de ce que devient l’émotion….
 
Pour ceux qui n’auraient pas vu la vidéo de Mr Ramesh (article « la cité de la peur »), observez que faire face à ses émotions est une bonne solution pour les gérer.
 

Pratique de l’affirmation

 
Pour finir je vous propose un petit exercice:
 

La balance du respect

 
Afin de travailler la notion d’équilibre dans la relation, voici un petit exercice pour savoir si celle-ci est trop déséquilibrée dans un sens – passif, les désirs de l’autre priment sur les miens, ou dans l’autre – agressif, peu importe les autres.
 
 
Après une conversation, parfois bien après, observez ce qui s’est passé, ce qui s’est dit. Vos désirs? Les siens? Observez de quel côté penche la balance.
 
Observation après observation peut-être verrez-vous que vous prendrez conscience du déséquilibre de plus en plus tôt, voire à l’instant présent.
 
Ceci vous permettra d’agir, ici et maintenant pour ce qui est important pour vous.
 
Percevoir le trouble c’est déjà le résoudre.
 
Comme dirait Carl Rogers (une de mes sources d’influence, cela vaut le coup de le googleliser),  chaque personne a en elle la capacité de se comprendre, d’avancer et de savoir intuitivement ce qui est important pour elle. Mais c’est vrai que parfois on a tous besoin d’aide.
 
J’espère une fois de plus avoir été assez clair. C’est avec plaisir que je répondrai à vos questions.
 
Parfois les techniques sont présentées simplement mais ne les sous-estimez pas elles nécessitent un réel travail d’apprentissage. Ce sont aussi des outils de psychothérapies, c’est toujours plus facile à deux. Alors si cela est trop compliqué ou votre souffrance trop grande peut-être avez vous besoin d’aide.
 
Pour approfondir voici deux livres (parmi tant d’autres)
Savoir s’affirmer de C.Cungi
Affirmez vous! de F.Fanget
 

Psychologue aux multiples influences je base ma pratique de prise en soin sur la thérapie d'acceptation et d’engagement, la psychologie positive ainsi que les thérapies cognitivo-comportementales. En institution, en cabinet de ville, en formation professionnelle ou encore en tant que Blogueur ma vision de la personne en souffrance est bien celle d'une personne non pas "malade" mais plutôt "coincée": En devenir. C'est ainsi à travers une pratique mêlant psychologie, philosophie, humour et métaphores que je voue mon activité professionnelle à aider la personne à avancer vers ce qui compte pour elle.