Psycho-Philo

Psychologie de l’illusion 2/4 Penser être sûr sans être sûr de ses pensées

Il est tout à fait normal, d’un point de vue de l’être humain, d’être sûr de ce que l’on pense. En effet c’en est même une condition d’existence, sans quoi nous pourrions sombrer dans la folie et douter totalement de ce que l’on pense. Douter de tout. Or, une nouvelle fois, la psychologie nous montre que ce bel appareil n’est pas  exempt de tout reproche.

Entre torsions et distorsions de l’esprit, la réalité vacille, encore.

En effet, si un prisme peut déformer la lumière qui le traverse, il en est de même pour les informations qui  transitent par notre belle pensante caboche. Voici quelques exemples de déformation de la pensée, à vous de voir celles qui vous parlent :

 

Abstraction sélective

C’est ici ne retenir qu’un détail de la situation en dehors du contexte. Par exemple, réussir un excellent gâteau au chocolat et ne retenir que l’on aurait pu le servir sur un plat carré plutôt que rond.

 

Disqualification du positif

C’est recevoir un « chérie tu es jolie » et se dire « oui mais il ne le pense pas vraiment » ;  « oui mais il a quelque chose derrière la tête »… et finir par dire que « tu ne me fais jamais de compliments » (rien de personnel avec le « il ».. en fait si.)

 

Inférence arbitraire (conclusion hâtive)

C’est ici tirer des conclusions sans preuve, lorsqu’on se dit « je n’y arriverai jamais » ou « cela ne marchera pas » sans avoir aucune raison valable de penser cela.

 

Personnalisation

C’est ici tout ramener à sa personne, c’est-à-dire se trouver fautif de tout ce qui peut arriver. Le « c’est de ma faute », encore une fois, en dehors de tout élément valable prouvant cette dite culpabilité.

 

Maximisation du négatif / minimisation du positif

C’est ici, par exemple, amplifier nos erreurs et minimiser nos réussites, soit : si je rate c’est de ma faute, si ça marche c’est grâce aux autres.

 

Raisonnement dichotomique

C’est une forme de pensée en interrupteur, un raisonnement en tout ou rien.  Soit vrai, soit faux soit noir soit blanc, il n’y a aucune nuance.

 

Surgénéralisation

C’est ici généraliser à partir d’une seule (ou quelques) expérience(s). Par exemple, sortir d’une mauvaise relation amoureuse et penser que les hommes sont tous les mêmes…

 

Fausses obligations

J’en ai fait un article ici (« l’enfer du devoir ») c’est ici l’enfer des « il faut que » et des « Je dois ». C’est se créer des obligations là où il n’y en a pas.

 

Enfin, un petit dernier pour la fin …

 

Etiquetage

Sartre ne renierait pas ce biais qu’on pourrait appeler le Biais d’essentialisation. Ces étiquettes qui peuvent nous coller toute une vie : « je suis maladroit » ;  « je suis bordélique » ;  « je suis timide » … une nouvelle fois sans preuve (ou si peu) et qui conduisent à la fois les autres à nous percevoir selon cette étiquette, mais également, nous-mêmes de nous comporter tel-quel. Selon Sartre, par opposition à l’essence, tel un chêne qui reste un chêne, l’existence c’est sortir de cette étiquette.

Ainsi, il est important de savoir que nous avons tous des biais de pensée et que c’est bien inutile de vouloir tous les corriger. L’important c’est de les remarquer, surtout lorsqu’ils sont fréquents et rigides. Dans ces moments là, souffrance naît au creux des vagues d’errances de notre pensée. Pas de panique donc. En effet, nous verrons à partir de la semaine prochaine de quelle manière nous allons pouvoir avancer à la fois avec nos cinq sens qui peuvent nous tromper mais aussi ces pensées parfois déformées.

D’ici là, libre à vous d’identifier quels sont vos biais les plus fréquents et, peut-être, d’essayer de les remarquer dans la vie quotidienne pour mieux les prendre en compte. C’est un peu comme savoir que votre balance de cuisine est décalée de 10 g, vous ne changez peut être pas la balance mais vous en tenez compte.

Bonne semaine,

Yannick