Psycho-Pratique

L’acceptation 2ème Partie (la meilleure): La revendication de ce qui pique

Bonjour à toutes et à tous,

Comme je vous l’avais annoncé le mois dernier voici la suite de l’article sur l’acceptation. Et comme promis je prends le pari de vous faire aimer ce que vous avez toujours considéré comme néfaste. J’ai nommé la  peur, la colère, les pensées jugeantes, la boule dans le ventre et j’en passe. En route

Si c’est là…

Pour citer et paraphraser le Philosophe Américain R.W Emerson il n’y a pas de mauvaises herbes, simplement des plantes auxquelles l’on n’a pas trouvé de vertus.

En effet, ces ressentis désagréables sont un peu comme cette dernière pièce d’un meuble Ikea. 



On pense qu’elle ne sert à rien, qu’elle ne devrait pas être là. C’est alors remettre en question l’organisation, la rigueur et le sérieux d’un Suédois. Alors? Ben si cette pièce est encore là une partie de votre tête vous dit bien qu’elle doit servir à quelque chose, mais à quoi?

…c’est que c’est utile


Le mois dernier nous avons vu comment ce qui nous fait souffrir n’est que le reflet de ce qui compte pour nous. J’aime ma femme, j’ai peur de la perdre. J’aime la justice, l’injustice me pique.


Ainsi, si c’est là depuis la nuit des temps et si c’est aussi répandu dans le monde c’est que cela sert à notre adaptation. En effet Charles Darwin disait que les espèces qui ont survécu n’étaient pas les plus fortes mais bel et bien celles qui possédaient la plus grande capacité d’adaptation.



Dis, à quoi ça sert?

Les émotions pas cool


Nos émotions du latin motio mouvement ont avant tout des vertus adaptatives. En effet, si je n’ai plus peur que se passe-t-il? Si je ne ressens plus la colère comment puis-je me défendre? Nos émotions représentent une sorte de cocktail hormonal, l’adrénaline pour fuir, la dopamine pour réussir un challenge. C’est là, ça sert donc. Je ne m’étends pas plus car j’en ai parlé ici Changer son regard sur ses émotions.



Les sensations pas cool


Il en est de même vis à vis de nos ressentis corporels désagréables. Peut-on  reprocher à notre corps de nous fournir des fourmillements, une boule dans le ventre lorsque nous agissons d’une manière inappropriée? Nos sensations corporelles sont alors comme un système d’indicateurs, une sorte de tableau de bord sensoriel. Lorsque nous nous éloignons ou nous rapprochons de ce qui compte pour nous ces indicateurs augmentent leurs manifestations ou non.



C’est par exemple comme un jeu de « chaud-froid » plus je me rapproche d’une personne qui me convient plus des sensations de désir me prennent le ventre et à l’inverse plus j’agis d’une manière éloignée de mes valeurs, comme le respect, plus je ressens une boule de culpabilité sur la poitrine.

Ressentir pour agir


C’est ainsi que l’homme a pu survivre sans le langage ni même une intelligence aussi développée que la notre. En effet, comment savoir ce qui est bon pour nous si nous n’avons pas d’indication? Ce système émotionnel/sensoriel est là depuis longtemps, bien plus longtemps que la conscience humaine. Alors faisons confiance à nos sensations et jouons à chaud-froid plus souvent.

La culture et l’éducation nous ont ainsi donné une piètre conception de nos ressentis corporels pour ne pas dire un déni du corps. Comment un lapin survivrait s’il n’avait plus confiance en ses sensations? N’est-ce pas ce à quoi nous invite la pleine conscience en observant nos sensations sans les juger?


Les pensées pas cool


« Je suis nul.le », « je n’y arriverai jamais », des pensées utiles? Au premier abord nous dirions bien non. Sauf que c’est là. 

En effet, une fois de plus si nous nous attachions à la fonction (adaptative) plutôt qu’à juger ces pensées. Ces pensées sont elles négatives en elles-même? Pas sûr, démonstration.

Imaginez que quelqu’un vous dise « Salop/Salope ». Est-ce une insulte? Oui et non tout dépend.

Ça dépends ça (me) dépasse


Imaginez vous sur une scène de théâtre et ce personnage vous dit « Salope ». A ce moment le public rit aux éclats. Insulte?


Autre exemple. Vous donnez rendez-vous à votre meilleur ami.e à un endroit bien précis puis vous ouvrez les portes de cette salle où attendent tous ses amis rencontrés depuis ces 30 dernières années. Il vous dit « Salop.e ». Insulte?





Enfin. Un homme dit à une femme « Salope » lors d’une manifestation pour le droit des femmes. Insulte? Non, délit selon article Article R624-4 qui considère cela comme une Injure.




Alors nos pensées sont elles négatives en soi? Non, tout dépend du contexte. Et si nos pensées jugeantes étaient dans un certains contexte (ici historique) une façon de se motiver? Le « tu n’y arriveras jamais », au siècle dernier, ne pouvait-il pas être considéré comme une mise au défi une stimulation et donc une fonction plutôt positive?

Ça dépends donc ça dépends


Tout dépend donc du contexte car en 2018 plus question de cela. Or, nos pensées datent souvent d’un contexte dont nous avons oublié la teneur.


Ainsi, nous venons de voir de quelle manière nos pensées, nos sensations mais aussi nos émotions ont avant tout une fonction. Une fonction adaptative, positive pour nous permettre d’avancer vers ce qui compte pour nous.


Alors, plutôt que de chercher à les faire disparaitre, plutôt que de les juger ne serait-il pas nécessaire voire vital de les reconsidérer? Ces contenus intérieurs plus que leur faire la place revendiquons les!


Vive la LPRPC! La ligue de protection des ressentis pas cool!



La fonction de ces événements: Des trampolines


 Si nous nous attachons à la fonction, nous retrouvons alors une flexibilité psychologique perdue. En effet, à force de lutter contre ces sensations (ce que nous appelons l’évitement expérience en ACT, soit lutter contre) nous nous en rendons esclaves. Je peux ainsi vous rendre esclave de vos pensées en vous promettant un million d’euros si vous ne pensez pas à un éléphant rose durant cette semaine.

Ainsi, observer ces ressentis, comme des trampolines, comme des invitations à agir, est alors plus ambitieux que la simple acceptation abordée précédemment. Les événements ne sont donc pas négatifs en soi, seule l’attitude que nous avons face à eux est déterminante. Et ici elle est certes surprenante: invitez vos ressentis à boire le thé (ou une bière)!

 

Lutter, accepter, remercier


Le principe est alors de remercier ces événements lorsqu’ils se pointent en nous et de choisir l’action qui suit. OUI ET.

OUI, je remercie et revendique ces picotements dans mon ventre car ils m’indiquent que je roule peut être trop vite sur cette neige.

OUI, je remercie et revendique ma pensée « tu n’es pas un bon psy » car elle m’invite à faire preuve d’humilité et à me dépasser.

OUI, je remercie et revendique ma colère face aux discriminations car elle m’invite à refuser cela et à œuvrer pour plus d’humanité.

OUI, je remercie ma tête de m’envoyer des images ou des souvenirs désagréables voire traumatiques pour m’éviter que cela se reproduise.

 

Un peuple qui oublie son passé se condamne à le revivre

Winston Churchill



Remercier, ce n’est pas dire que l’on aime ce que l’on ressent. Remercier c’est un peu comme mon Oncle Robert qui cherche à me donner des conseils pour élever mes enfants.  Lui, dont la pédagogie n’a d’égale que l’humanité de Donald Trump mais qui, dans les années 20, était tout à fait adaptée (encore une question de contexte). Merci Tonton Robert mais je gère

Remercier c’est reconnaitre la fonction sans pour autant être d’accord avec le contenu. 

Merci, mais c’est moi le patron. 

Voici donc la fin de cet article. Alors? On invite ces « mauvaises choses » à boire une bière ?


 J’espère vous avoir si n’est convaincu.e, au moins pu vous donner un autre point de vue sur les raisons pour lesquelles ce que nous nommons souffrance ne disparaît pas. Moralité ne jamais jeter la fameuse pièce du meuble Ikea, y a pas plus rigoureux qu’un Suédois!

Et pour aller plus loin sur cette acceptation/revendication lisez cet article qui contient un bon exercice sur ce thème  Ce contre quoi l’on résiste existe…


A bientôt

Yannick 

Psychologue aux multiples influences je base ma pratique de prise en soin sur la thérapie d'acceptation et d’engagement, la psychologie positive ainsi que les thérapies cognitivo-comportementales. En institution, en cabinet de ville, en formation professionnelle ou encore en tant que Blogueur ma vision de la personne en souffrance est bien celle d'une personne non pas "malade" mais plutôt "coincée": En devenir. C'est ainsi à travers une pratique mêlant psychologie, philosophie, humour et métaphores que je voue mon activité professionnelle à aider la personne à avancer vers ce qui compte pour elle.