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Qu’est-ce que l’acceptation? un regard positif sur ce qui pique en nous. 1ère Partie

Bonjour à toutes et à tous,

Je parle souvent d’acceptation, de faire la place à nos ressentis désagréables, or je n’ai jamais pris le temps de véritablement disserter sur ce qu’est cette notion bizarroïde.
 
Et si tout ce qui nous faisait souffrir était avant tout une bonne nouvelle, si tout était la conséquence d’une mauvaise compréhension, un gigantesque quiproquo?
 

Si vous souhaitez faire fructifier ce qui est parfois désagréable en vous plutôt que de chercher à vous en débarrasser en route! Il nous faudra bien deux articles, deux étapes pour arriver à destination.


Ainsi, nous avons tous besoin que les choses soient organisées, droites. Les trains sont censés arriver à l’heure, la circulation doit être fluide.
 
Tout doit rouler, tout doit être en ordre. C’est un fait, la technologie nous a habitués à ce que les choses se passent bien et il nous est difficile d’accepter les aléas.
 
 
 
Nous vivons dans une conception, une règle, où le monde est  cohérent, organisé, ordonné. Nous nous construisons des histoires à propos d’une vie juste, normale. Cette vision auto-centrée fait alors abstraction de toute une somme de données qui prouve le contraire. Le monde n’est pas juste, ordonné, prévisible. Le monde est aussi chaos.
 
 
Cette conception du monde et de ses locataires induit alors un refus de la souffrance, un refus de ce qui est désagréable en nous. Et pourtant c’est là.
 
En effet, la souffrance humaine est là et elle n’est réservée ni à soi ni à l’autre. La souffrance est Universelle. Pour preuve, combien de personnes connaissez-vous n’ayant pas vécu de période douloureuse en luttant contre des problèmes psychologiques ou sociaux? La réponse à cette question n’est pas si aisée. Les études statistiques montrent alors que 30% des adultes de cette planète sont porteurs de problèmes psychologiques et 50% d’entre-nous croiseront un trouble psychologique au cours de notre vie (Kessler et al. 2004).
 
La France championne du monde de la consommation d’anxiolytiques. Résultats?
Cette introduction n’est pas des plus sympathiques (rassurez-vous cela se termine toujours bien) mais cet article est destiné à évacuer une chose qui me fait souffrir moi en thérapie : que les gens se rendent malades d’être malades en pensant que les Autres, eux, vont bien.
 
Se rendre malade d’être malade ; souffrir de souffrir 
 
 

C’est « livré avec » 

En effet, il y a alors une tyrannie du bonheur, une tyrannie du tout va bien normalement  qui conduit certains d’entre-nous à se dire : alors pourquoi moi je n’y arrive pas? En effet, nous courrons tel Sisyphe après une vie sans stress, sans émotion désagréable, sans trouble… à s’en rendre malades d’être malades.
 
La grossesse bien qu’annonciatrice d’un heureux événement n’est pas sans angoisse, sans peur. Avoir un super job, deux beaux enfants et une femme adorable n’exonère pas de la peur de perdre, de l’anxiété vis à vis de l’avenir. Ces personnes devraient avoir tout pour être heureuses, sauf qu’à refuser que le fait de souffrir est naturel elle s’enferment dans le lourd silence des légères apparences.

Cette attitude est alors une lutte pour refuser ce qui pourtant est là depuis tous les temps. Le problème n’est alors pas dans la présence ou non de la souffrance mais bel et bien dans cette ineffable lutte.  
 
 

Une partie de la solution se trouve dans l’histoire de la double flèche chez les bouddhistes.
 
Le Bouddha raconte l’histoire d’un homme qui reçoit une flèche dans le dos et crie de douleur. C’est la flèche de la douleur. Puis, vient la seconde flèche, symbolique elle et qu’il s’inflige, celle de la souffrance. « Pourquoi l’ai-je reçue? », « Ce n’est pas possible, je n’aurais jamais du prendre cette flèche, je dois travailler », « Je suis vraiment nul d’être passé par là ». Il rumine, il peste contre cette flèche reçue. Il souffre de douleur.
 
Cette histoire nous montre que la douleur nous prend au dépourvu et que nous n’avons aucun contrôle sur le hasard. En revanche, nous nous torturons bien plus encore en luttant contre la douleur et faisons de nous notre propre bourreau. Cet homme n’accepte pas et amplifie le mal. Le problème est que, tels coincés au milieu de sables mouvants, plus nous luttons plus nous nous enfonçons. Plus nous cherchons à ne pas penser à ça…plus nous y pensons. Plus nous cherchons à lutter contre nos peurs plus nous nous en rendons esclaves.
L’heure est alors de parler de ce qu’est l’acceptation. C’est là, certes, donc autant faire avec.

 

Résignation? Non, Acceptation

 
 
 
L’acceptation est un processus central en thérapie d’acceptation et d’engagement (vous voulez savoir ce qu’est l’ACT? lisez ceci). Loin d’être une simple résignation cela constitue une attitude active face à nos ressentis intérieurs. En effet, nous avons vu que de lutter contre nos émotions, pensées ou sensations désagréables ne faisait que les amplifier. L’acceptation est ainsi « consentir »(notez le préfixe « co » avec) à faire de la place à ses ressentis sans que ceux-ci commandent nos comportements. C’est ainsi, les regarder dans les yeux et peut-être apprendre à comprendre ce qu’ils peuvent nous apporter. Et ce, en dépit de ce que l’on a pu nous raconter: « il faut pas avoir peur », « il ne faut pas avoir de mauvaise pensée »…etc.
 
Si nous reprenons la métaphore des sables mouvants, pour sortir de ceux-ci il faut se mettre à plat ventre. Soit, augmenter sa surface de contact avec le sable. L’acceptation c’est ainsi s’autoriser à rester en contact avec ce qui nous parait désagréable pour ainsi se libérer d’une lutte et peut-être avancer vers nos valeurs et les gens qui comptent pour nous.
Ainsi trêve de théorie essayons d’illustrer cette notion par une métaphore.
 
Prenons une pièce de deux euros
 Cette face, représentant la valeur, est toujours livrée avec une autre où l’on se demande bien à quoi elle ressemble de telle sorte que nous aimerions deux faces  « Deux Euros ».
 
 
 
C’est ainsi comme dans la vie, le côté valeur représente ce qui compte pour nous et c’est également « livré avec » des sentiments parfois désagréables. En effet, si ma femme est importante pour moi, il est alors normal que j’ai la peur de la perdre, non? De même si, pour moi, la compétence, en tant que psychologue, est une valeur fondamentale est-ce normal d’avoir peur de l’incompétence? Oui évidemment.
 

Deux solutions s’imposent alors à moi. Soit je refuse ce qui me dérange et suis prêt à quitter ma femme pour ne plus ressentir la peur. Soit je garde ma femme mais « accepte » et fais de la place à cette sensation certes désagréable mais qui signifie qu’elle compte pour moi. Donc j’espère garder longtemps encore à la fois la peur de perdre ma femme mais aussi celle de l’incompétence.
 
Heidegger nous invite à penser dans cette direction car, pour lui, l’homme est soucieux par natureLe souci est l’être de l’homme disait-il. Lorsque l’on se soucie, on se soucie de quelqu’un, de quelque chose. Ces soucis que nous traitons comme des erreurs, des désordres, ne sont en fait que des invitations à « prendre soin de ». Ce sont ainsi des attentions durables portées à ce qui compte pour nous: Nos proches, nos valeurs.
 
Mon ami Nietzsche se ramène alors et me dit:
 
– Tu veux Kifer grave la life Yannick?
– Oui. Lui dis-je
– La justice est une valeur fondamentale pour toi?
– Ah ça oui!
– Eh bien sache, mon ami, que plus la justice sera importante pour toi plus l’injustice t’étreindra les tripes. Es-tu prêt à cela?
– Euh, je vais peut-être réviser mes attentes de justice alors.
– Ah, je vois que tu as entrevu une autre voie.
– Laquelle?
– Eh bien si tu acceptes, tel le Bouddha (oui Nietzsche était aussi pote avec le Bouddha)
 de te séparer de tes biens, des personnes qui comptent pour toi, de délaisser ces attentes, alors tu connaitras le Nirvana. Plus de souffrance!
 – Laisse béton, je préfère me laisser étreindre les tripes mais je vais revoir mes attentes de justice à la baisse.
 
 
En effet, ce que feu Nietzsche nous soumet ici c’est que ce sont nos attentes qui nous font souffrir autant. Plus ma femme, plus la justice seront importantes pour moi plus ma souffrance grandira. C’est un peu comme si, plus la pièce est grande plus son envers le sera également. La solution est alors de modérer nos attentes. Ma femme est importante, mes patients également mais tout un tas d’autres personnes et valeurs aussi. La richesse dilue alors la proportion.

Enfin, si c’est livré avec, c’est que c’est à nous. C’est NOUS! Comme Carl Roger le suggérait, l’acceptation nous rapproche de nous,  l’inverse étant comme vouloir avancer sans une jambe.
 

Si je souffre c’est que j’aime

 
Alors vous allez certainement me dire que c’est trop douloureux de garder une sensation aussi énorme et qui parfois nous envahit. En effet, je suis d’accord avec vous. Mais est-elle énorme d’emblée ou bien devient-elle énorme à force de la refuser?
Après tant de temps à lutter contre, votre cerveau va avoir besoin de temps pour inverser la tendance et changer son point de vue sur ces événements, certes désagréables. En effet, l’acceptation est une compétence qui s’apprend. Votre cerveau aura besoin de temps pour activer les chemins neuronaux qui y mènent.
 
D’ici là peu être puis-je vous donner un exercice qui va faciliter cet apprentissage.
 

Hermann, le petit copain Rasta-Gothique de votre fille

 
Les ressentis désagréables sont pour l’instant comme le nouveau petit copain de votre fille de 13 ans prénommé Hermann. Il a tout pour déplaire mais franchement vous n’avez pas le choix. C’est Elle et Lui ou rien! Plus vous lutterez pour qu’elle le quitte, plus elle risquera de rester avec. Plus vous le refuserez, plus vous en parlerez et plus vous y penserez. Hermann in your dream. Une seule solution, invitez-le à votre table, tolérez le et là vous aurez votre fille.
 
Imaginez, lorsque qu’une émotion, une pensée ou encore une sensation désagréable se pointe en vous que cela soit votre Hermann. Vous pourriez les repousser mais ce serait pire et vous obligerait à vous séparer de ce qui est important. Et si vous faisiez connaissance? Et si, malgré les apparences, vous écoutiez ce que cette « peur » a à vous apprendre? Pour cela, lors de moments difficiles,  prenez le temps de répondre à toutes ou parties de ces questions.
 
  1. Où se situe dans votre corps cet événement désagréable (une pensée, une émotion, une sensation)?
  2. Si je vous donne un stylo magique pour en dessiner les contours, Quelle forme a-t-il?
  3. Quelle couleur prend-il?
  4. Quel aspect prend-il? Lisse, pointu, rugueux?
  5. Si c’était un animal, un personnage de dessin animé ou de film, lequel serait-il? Gollum? Calimero? Jean-Pierre Bacri (pour les grognons)?
  6. Imaginez-vous lui glisser une phrase du type « Ok tu es là mais c’est moi le patron »
  7. Enfin Passez-lui le Bonjour de « Yannick »!
 
 
Observez ensuite quel rapport vous avez à ce ressenti désagréable et surtout quelle place prend-il, Plus? Moins? A vous d’observer.
 
Voici pour cette première partie sur l’acceptation. Eh oui il y a un acte 2! En effet le mois prochain je prends les paris de vous faire aimer et revendiquer (oui oui vous avez bien lu) ce que jusque là vous auriez voué aux gémonies.
 
A bientôt et ne soyez par trop dur.e avec le petit copain de votre fille… 🙂
 
Mise à jour du 21 Mars 2020, voici une vidéo destinée à mieux vous faire comprendre ce qu’est l’acceptation
 

 
 
 
 
 
 

Psychologue aux multiples influences je base ma pratique de prise en soin sur la thérapie d'acceptation et d’engagement, la psychologie positive ainsi que les thérapies cognitivo-comportementales. En institution, en cabinet de ville, en formation professionnelle ou encore en tant que Blogueur ma vision de la personne en souffrance est bien celle d'une personne non pas "malade" mais plutôt "coincée": En devenir. C'est ainsi à travers une pratique mêlant psychologie, philosophie, humour et métaphores que je voue mon activité professionnelle à aider la personne à avancer vers ce qui compte pour elle.